ARAGON, Louis

Aurélien

Roman. Aurélien est un ancien combattant de la Première guerre mondiale, terminée il y a trois ans. Rentier oisif, Aurélien noue et dénoue avec facilité des relations amoureuses sans conséquences. Son “ami” Edmond Barbentane lui présente sa cousine Bérénice, provinciale en apparence assez fade et peu satisfaite de sa vie quotidienne (épouse d'un pharmacien manchot). Edmond pousse Bérénice dans les bras d'Aurélien, qui tombe amoureux (blessant ainsi Blanchette, la femme négligée d'Edmond). Bérénice aime Aurélien mais son goût de l'absolu la pousse à compliquer les choses : fuyante, elle refuse de se donner à lui, d'autant plus qu'elle éprouve des remords après la tentative de suicide de Blanchette. Elle décide cependant de s'offrir à son amour ; au même moment, Aurélien, désespéré, découche avec une prostituée, ce que Bérénice ne peut lui pardonner. Elle s'enfuit avec un petit artiste, Paul Denis, qu'elle quitte finalement pour rejoindre le foyer familial. Aurélien tente avec difficulté de l'oublier. Entre temps Edmond prend pour maîtresse une actrice (Rose Melrose, femme du malheureux docteur Decoeur) et monte avec elle une affaire foireuse. Blanchette divorce et se remarie avec Adrien Arnaud (collaborateur d'Edmond), ruinant au passage son mari. Epilogue : en 1939, Aurélien (marié et petit chef d'entreprise), mobilisé, est amené à loger chez Bérénice pendant la débâcle. Tous deux constatent l'ampleur de ce qui les sépare (Bérénice veut résister, tandis que l'on flaire chez Aurélien un pétainiste passif : c'est à l'image de leur vie et de leur mentalités respectives) et abîment leurs souvenirs. Au retour d'une petite sauterie à la campagne, Bérénice reçoit une balle perdue et meurt.
Comment être malheureux lorsqu'on peut être heureux en 500 pages. Fichu goût de l'absolu. Chef-d'oeuvre.


Les Beaux quartiers

Roman. Dans Sérianne, petite bourgade du sud, les deux fils du docteur Barbentane, Armand et Edmond, grandissent dans l'atmosphère de conflit qui règne entre leur mère, une dévote qui joue les persécutées et leur père, libre-penseur de la auche radicale. Edmond monte à Paris faire sa médecine. Il y rencontre Carlotta, la “poule” du richissime Joseph Quesnel, un vieil homme d'affaires. Le jeune fauché et le vieux fortuné s'associent pour garder la superbe et changeante italienne, qu'ils aiment passionnément et qui a besoin d'eux deux. Armand, après avoir été la grenouille de bénitier souhaitée par sa mère, rompt avec Dieu et sa famille, devient sans-abri à Paris et se tourne vers le syndicalisme socialiste. Il symbolise pour Aragon celui qui a choisi la justice sociale contre son camp. Le tout sur fond de guerre imminente (loi des trois ans), de critique virulente (mais humaine) des gros et petits industriels ainsi que du radicalisme petit-bourgeois de la Belle Epoque.


Les voyageurs de l'impériale

Pierre Mercadier, professeur d'histoire, père de deux enfants, Paul et Jeanne, supporte de moins en bien sa femme Paulette, d'un irritante sottise et sa vie en général. Il abandonne donc sa famille, son essai sur John Law, pour voyager à Venise, à Monte-Carlo (où il rencontre Reine, une belle femme qui réalise qu'elle l'aime une fois qu'il est parti). On le retrouve finalement à Paris, misérable. Recueilli par un ancien ami juif, Meyer, convaincu jadis du génie et de la bonté de Mercadier (car celui-ci l'invitait chez lui en pleine affaire Dreyfus), il reprend son boulot de prof pour survivre. La tenancière du bordel dans lequel il va secrètement boire un coup tous les soirs tombe amoureuse de lui. Un dimanche, alors qu'il lui rend visite en banlieue, il fait une attaque qui le rend incapable de se mouvoir et de parler. Dora abandonne alors son bordel pour s'occuper de lui, sans prévenir qui que ce soit, voyant dans cet impotent le grand amour de sa vie. Il mourra entre ces bras au début de la guerre de 14. Son fils Paul y est mobilisé et se bat pour que Jeannot, l'enfant qu'il a eu de la seule femme qu'il eut aimé (parmi toutes celles qui l'ont aimé, à commencer par Reine, qui se suicide à l'approche de la guerre), Yvonne, ne connaisse jamais cela. La tragédie historique, de l'antisémitisme à la grande boucherie, sous-tend le roman, avec en premier plan, l'égoïsme profond de Mercadier, la profondeur de la bêtise et des préjugés bourgeois, et l'irrémédiable malheur de tous les autres, bons ou mauvais.


 
litterature/fiches/aragonlouis.txt · Dernière modification: 2009/08/15 23:12 (édition externe)     Haut de page