LE CLEZIO, Jean-Marie G.

Désert

Roman. Lalla, enfant du désert, est fascinée par l'apparition d'un mystérieux homme bleu, Es Er (le secret), par la puissance de la nature. Avec un jeune berger dont elle est amoureuse, elle tente de fuir dans leur désert, avant de s'exiler à Marseille. Confrontée à la misère, son âme lumineuse se durcit. Elle travaille dans un hôtel sordide alors qu'elle est enceinte, puis remarquée par une photographe, elle devient une cover-girl célèbre. Cependant rien n'éteint sa soif de désert, et elle y retourne pour accoucher, seule et debout, comme ses ancêtres.


Le chercheur d'or

Roman. Alexis (surnommé Ali) vit avec ses parents, sa soeur Laure et son ami Denis dans un lieu isolé de l'île Maurice, le Boucan, sorte d'Eden un peu étouffant où ils mènent une vie libre, au contact de la mer et de la nature, complétée par leurs rêves d'aventure. La ruine de la famille, par les projets d'un père utopiste, les projette dans le monde réel, aux prises avec la misère, l'oncle Ludovic (homme d'affaires colonialiste qui ne perd pas son temps à regarder les étoiles). Après la mort de son père, Ali occupe brièvement la place de comptable que lui a accordée l'oncle, avant de s'embarquer sur le Zeta, laissant sur le quai sa mère et Laure, qui sait bien que rien ne peut le retenir. Commence une quête sans fin, à la recherche d'un hypothétique trésor (dont rêvait déjà son père et par lequel il espère pouvoir reconquérir l'Eden perdu du Boucan) et de lui-même. Sur l'île de Rodrigues, vivant comme un sauvage au fond de la vallée qu'il explore, il rencontre Ouma, une manaf, qui devient son amante. Puis vient la guerre de 14-18. Ali est gagné par la fièvre d'engagement qui saisit les gens de l'île à l'idée d'une mort glorieuse. Pressentant son départ, Ouma disparaît. Ali part pour le front, où nul gloire n'attend les morts et dont le sauve finalement le typhus. Il revient médaillé et chargé d'une récompense qu'il laisse à sa soeur et à sa mère, avant de repartir pour Rodrigues. Ouma a disparu, la population a été décimé. Après une nouvelle période transitoire dans la vallée, il quitte Rodrigues en apprenant que sa mère est mourante. Enfin, après la mort de celle-ci, il est engagé par son cousin Ferdinand, successeur de l'oncle Ludovic, comme sirdar (intendant chargé de surveiller les noirs qui travaillent dans les champs de canne). Il retrouve Ouma sur sa route, part avec elle vivre quelque temps dans la vallée sombre qui l'a toujours fasciné, Mananava, puis, Ouma partie, poursuit seul son cheminement de renoncement total, de communion avec les éléments.

Contrairement à l'interprétation généralement donnée du roman (4e de couv, par ex), je n'ai pas vraiment eu l'impression que le héros “se trompait d'objectif”, qu'il faisait fausse route. Simplement il chemine et ce cheminement passe par des recherches vaines sans qu'il y adhère jamais du fond de son âme. Malgré sa frénésie, croit-il vraiment trouver un trésor, retrouver son Eden perdu ? Non : il n'y a pas de réel désespoir lorsqu'il comprend qu'il n'y a pas de trésor, que le retour au Boucan est impossible, qu'Ouma le quitte. Ses recherches, ses allers et retours continuels, lui permettent descendre en lui plus profondément, de se fondre plus intensément dans la nature. De même, je n'ai pas eu l'impression qu'il découvrait a posteriori le bonheur qu'il avait connu dans son cheminement (contrairement à un Julien Sorel, par exemple). Même tendu vers un but, il ne néglige jamais le plaisir de l'instant, la contemplation de la mer, de étoiles, les sensations du vent, de l'eau, du corps chaud d'Ouma. Dès l'enfance il a ce goût de la contemplation, ce sensualisme qui ne le quitte pas. Comme s'il savait dès le départ que sa quête n'avait d'autre but qu'elle-même, de la mer à la mer. A noter à quel point aussi ce cheminement est exclusif non seulement de la société mais aussi de tous les autres, y compris de sa soeur qu'il adore mais dont il se sent progressivement séparé. Il progresse dans une bulle où le réel (celui, ô combien brutal de la guerre, par ex) n'intervient que comme une étape.

2007-02

 
litterature/fiches/lecleziojean-marieg.txt · Dernière modification: 2007/12/20 22:44 (édition externe)     Haut de page