Iseut

 

 

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Le Contexte

Le XIIe siècle fait apparaître une contradiction douloureuse pour le sexe masculin. D’une part, les familles cherchent à ne marier qu’un fils afin de faciliter la transmission de l’héritage, ce qui voue nombre de chevaliers au célibat. D’autre part, l’Eglise affiche sa volonté d’encadrer le mariage (en interdisant l’inceste et la polygamie) et de cantonner le sexe au mariage. La somme de ces volontés interdit donc le sexe à bien des hommes, ce qui n’empêche pas ceux-ci de chercher de belles proies. C’est par conséquent un facteur de désordre qui rend nécessaire l’aménagement des relations entre hommes et femmes.

Le roman de Tristan met en lumière un exemple de désir fou et de ses conséquences fatales, tout en offrant une ouverture vers un amour véritable (et non plus un simple désir sexuel).

L’histoire

Preux chevalier ayant réalisé de multiples exploits, Tristan est choisi pour conduire Iseut (la Blonde) chez son futur mari, le roi Marc. Pendant le voyage (en bateau), les deux jeunes gens absorbent par erreur un philtre d’amour qui les rend fous l’un de l’autre. Leur désir tumultueux ne s’éteint pas lorsqu’Iseut épouse Marc. Lorsque leur liaison est découverte, ils s’enfuient, jusqu’à ce que les effets du philtre s’apaisent et que le devoir impose à Iseut de rejoindre son époux. Tristan tente de l’oublier en épousant une autre Iseut (aux mains blanches), mais il n’y parvient pas. Lorsqu’il est blessé, c’est Iseut la Blonde qu’il appelle à son chevet, suscitant la jalousie de sa femme. Lorsque l’Iseut aimée, longtemps retardée par la tempête, arrive à bon port, Tristan a expiré et elle souhaite le suivre dans l’au-delà.

La mort des amants (extrait du roman)

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Commentaire

Si la figure masculine de Tristan domine le récit, le personnage féminin n’en est pas moins finement décrit. Le partage du philtre induit une égalité devant le désir : Iseut n’est pas une simple proie.

Le roman, transmis oralement dans toute l’Europe avant d’être consigné par écrit, permet d’avoir une idée de l’image de la femme à la fin du XIIe siècle. Physiquement, Iseut est belle, mais pas d’une beauté gracile. Même si son corps disparaît sous les vêtements, on la devine robuste : les chevaliers exigeaient en effet des compagnes solides. Iseut a également un caractère maternel propre à combler les chevaliers sevrés de présence maternelle : elle guérit, elle console. Cependant, elle n’a pas d’enfant. Il est en effet classique d’associer l’adultère à la stérilité. Compagne d’adultère habile, elle incarne le danger que représente toute femme. L’image d’Iseut n’est donc pas entièrement positive, sa sensualité paraît excessive (Tristan est persuadée qu’Iseut prend plaisir aux caresses de Marc). Néanmoins, comme Tristan, elle n’est pas présentée comme entièrement responsable de ses désirs dans un premier temps (à cause du philtre) : on peut y voir une volonté de déculpabiliser les chevaliers prisonniers de fougueux désirs. La culpabilité n’apparaît qu’après dissipation des effets du philtre : tous deux sont partagés entre amour et devoir. En persistant à s’aimer, ils deviennent pleinement responsables de leurs actes. C’est un amour malheureux car impossible, mais les deux héros y trouvent une occasion de se dépasser. On rejoint ici une vision plus moderne de l’amour.