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Eugène Delacroix

(1798-1863)

 



Baudelaire et Delacroix se connaissaient bien et s'admiraient mutuellement. Baudelaire attribue à son peintre préféré un caractère empreint de scepticisme, de dandysme, de ruse, de tendresse modérée, de bonté...

Comme en témoigne la Mort de Sardanapale ou les Femmes d'Alger, Delacroix sait peindre les femmes avec beaucoup de grâce. Il les aime, mais, d'après Baudelaire, il les considère avant tout comme des objets d'art.


Avec le massacre de Scio, Delacroix s'engage en faveur de l'indépendance grec, comme beaucoup d'intellectuels de son époque. A l'origine, Delacroix avait choisi de peindre un rocher en toile de fond. L'influence de Constable le fait d'avis. Il peint donc un ciel gris, qui souligne l'isolement et la fragilité de l'île. Au premier plan, une vieille femme décharnée est assise aux côtés d'une femme verdâtre, vraisemblablement morte, sur laquelle un enfant tente de se nourrir. Les personnages ont les yeux cernés de rouge. Baudelaire admire cette " maîtrise de la douleur " qui suscite l'émotion, cette beauté née de l'horreur, une fleur du mal.


Baudelaire considère Delacroix comme un peintre littéraire. Ce dernier choisit souvent des thèmes littéraire, comme la Mort de Sardanapale (Byron) ou la Barque de Dante.

Dans ce dernier tableau, Dante est guidé par Virgile vers l'enfer. Le Styx charrie des cadavres. Delacroix a pour référence les damnés de la Sixtine, à la musculature outrée

 

Sardanapale, quant à lui, a une attitude de femme. Après une défaite politique, il décide de s'immoler avec toute sa maisonnée. La pièce centrale du tableau est en fait la lyre, dont la branche droite est parallèle à l'attitude de la femme transpercée par une dague. Le même mouvement se retrouve dans le bras du personnage de droite qui lance une torche sur le lit-bûcher. Le rouge est une couleur dominante : c'est le fleuve de sang évoqué dans les Phares.


Delacroix sacrifie " le détail à l'ensemble ". Les contours sont souvent imprécis, la couleur l'emporte sur la ligne. Baudelaire souligne la difficulté de " modeler avec de la couleur ", art que maîtrise parfaitement Delacroix. Il confère à Delacroix un rôle prophétique. On peut effectivement le considérer comme un précurseur des impressionnistes (peinture par touche du coussin des Femmes d'Alger ").

Baudelaire compare Hugo et Delacroix, au détriment du premier. Hugo est "plus adroit qu'inventif". Il emploie dans ses écrits un " système d'alignement et de contrastes uniformes ". Il utilise " froidement toutes les ressources de la rime ". Delacroix a au contraire une intelligence intime du sujet. Hugo n'en arrache que la " peau ", Delacroix les " entrailles ".