CONCLUSION


" Son génie, car c'est de génie après tout qu'il s'agit, est un tissu d'ambiguïtés et de contradictions ; la fascination qui émane de ses peintures, même les plus compliquées et les plus longuement méditées, tient très souvent à ce singulier mélange de qualités opposées qui n'a pas échappé à Baudelaire." (G. Briganti in l'Expresso, 1968). Ingres semble être en effet à lui seul un antagonisme. Il se veut chef de file du classicisme ; il ne cesse de le trahir. Il s'affiche en maître du dessin ; il l'est effectivement, mais d'une manière parfois si inattendue que c'est justement sa ligne que les critiques attaquent. Homme d'ordre, infiniment moral, il ne désire peindre que des nus académiques d'une extrême pureté ; il conçoit des femmes si sensuelles, aux courbes si étranges, quelles séduisent les amateurs de sujets érotiques. Quelle marge entre l'homme tel qu'il se veut, et l'artiste tel qu'il est ! Ces antinomies se retrouvent bien sûr dans sa peinture et tout particulièrement dans Le Bain Turc, symbole d'un vieillard qui à force de contradictions irrésolues, est parvenu à produire à quatre-vingt deux ans un chef-d'œuvre d'une fraîcheur intacte, d'une profonde originalité, et d'une vive sensualité.