Deuxième partie : rencontre avec l'orientalisme


I - Qu'est-ce que l'orientalisme ?



Le Bain Turc se situe de plein pied dans la mouvance dite orientaliste. D'où l'intérêt de faire ressortir les caractéristiques de ce mouvement et de voir comment Ingres l'a utilisé.

Une attirance ancienne

En 1704 paraît une première version des Mille et Une Nuits. Ce récit installe dans les mentalités françaises, et occidentales en général, une série d'images très particulières, voire un peu réductrices, de l'Orient. Celui-ci apparaît comme la contrée exotique des califes, des vizirs, mais aussi comme celle de l'érotisme, de la violence, de la ruse et d'une certaine manière, de la poésie. C'est en tout cas un domaine qui demeure mystérieux, grâce au secret qui entoure les palais ottomans. En 1714 paraît un ouvrage sur les costumes turcs, inspiré par les portraits que l'artiste Jean-Baptiste Vanmour a été amené à peindre à Constantinople, pour les dignitaires européens. La visite, à deux reprises (1721 et 1742), d'ambassadeurs turcs, déclenche un intense phénomène de mode qui touche tous les domaines artistiques : littérature, opéra, et bien sûr peinture. Certains peintres comme Boucher, Lancret, Carle van Loo, Fragonard suivent ce courant, bien qu'ils n'aient jamais entrepris le voyage, contrairement à quelques rares artistes comme Liotard. La mode des turqueries, quelque peu éteinte par la suite, se ranime pendant la campagne égyptienne de Bonaparte. Le courant orientaliste connaît un développement parallèle en Angleterre. Il en demeure un témoignage extrêmement intéressant, celui de Lady Mary Wortley Montagu, qui séjourne deux ans à Constantinople, séjour retracé dans un grand nombre de lettres sur lesquelles nous reviendrons.