REMBRANDT VAN RYN

 

"Rembrandt, triste hôpital tout rempli de murmures,
Et d'un grand crucifix décoré seulement,
Où la prière en pleurs s'exhale des ordures,
Et d'un rayon d'hiver traversé brusquement"

(Baudelaire, Les Phares)

Rembrandt van Ryn est né en 1606 à Leyde. Il est le cinquième des sept fils d’un meunier aisé. Il n’est pas vraiment un lettré mais accède aux lettres par la peinture. En 1625, il forme son atelier à Amsterdam. Il s’installe définitivement dans cette ville en 1632, date à laquelle il réalise sa première grande commande : une leçon d’anatomie (dissection). Son atelier devient important (35 élèves). En 1642 il perd sa femme, Saskia. Il vivra désormais avec sa servante, Hendrikje Stoffels, et son fils Titus. Saskia ayant interdit à Rembrandt de se marier sous peine de perdre l’usufruit de ses biens, celui-ci vit en concubinage. Il sera pour cette raison l’objet d’une condamnation de la Cour ecclésiastique d’Amsterdam en 1654.

Rembrandt n’est que le prénom du peintre. Il l’a choisi comme nom à l’image de Michel-Ange, Raphaël.

La peinture de Rembrandt se caractérise par une palette très sombre d’or, de brun, d’ocre, de noir. Ceci est caractéristique de son ascétisme protestant.

 

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Bethsabée au bain, 1654

La toile forme un carré de 1,42m de côté. Il s’agit pour un nu d’un très grand format, inhabituel dans la peinture hollandaise.

L’histoire de Bethsabée est contée dans le livre de Samuel. Il s’agit d’une femme mariée à un militaire, que David aperçoit nue au bain. Il la convoque alors, tandis qu’il envoie son mari en première ligne d’une bataille, où il meurt. Pour punir David de s’être attribué ainsi cette femme, Dieu fera mourir son premier enfant. De même, Rembrandt avait perdu le premier enfant issu de sa relation illégitime avec Hendrikje.

 

Or cette dernière a servi de modèle à Bethsabée (on reconnaît les traits du visage du Portrait de Hendrikje Stoffels). Le corps de Bethsabée est lourd, sans idéalisation, présenté de trois quarts (alors que le visage est présenté de face). Sa tête est courbée sous le poids du destin. Elle tient la lettre de convocation, marquée du sceau rouge de David.On l’apprête : le corps nu est couvert de bijoux (bracelet au bras, collier, boucles d’oreilles). La servante -dont le riche habit fait ressortir la nudité de Bethsabée - lui lave les pieds : c’est un geste rituel de purification. cliquez pour agrandir

 

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L’archange Raphaël quittant la famille de Tobie, 1637

Il s’agit d’une scène de l’Ancien Testament. Tobie a été éprouvé à la manière de Job, il a notamment perdu la vue. Son fils, parti chercher le règlement d’une dette, a été escorté par l’archange Raphaël, qui lui a donné le moyen de guérir la cécité de son père (avec le fiel d’un poisson). Ici Raphaël quitte la famille de Tobie en leur révélant sa nature divine. Le chien semble effrayer par cette apparition surnaturelle, de même que les femmes. Il y a deux sources de lumière : une source divine, qui entoure l’ange, et une source naturelle.

Saint Matthieu inspiré par l’Ange, 1661

C’est Titus qui servit de modèle à l’ange qui guide Saint Matthieu dans sa rédaction de l’évangile. Le cadrage témoigne de l’influence du Caravage : le spectateur est très proche des deux figures. Le Caravage avait d’ailleurs peint ce sujet, mais son tableau avait déplu, car l’ange y tenait la main du saint, faisant passer ce dernier pour un illettré. Le visage du vieillard, empreint de reflets ocres et verts sombres, encadré d’une belle barbe grise, est magnifique.

Le Philosophe, 1633

Un homme médite près d’une fenêtre. Derrière lui monte un escalier en colimaçon dont on ne voit pas la fin : il symbolise l’élévation de la pensée. Rembrandt était très lié au milieu juif et attiré par les vieux rabbins du type de celui qui est représenté ici. Deux sources de lumière viennent éclairer légèrement cette scène très sombre : celle de la fenêtre et celle du feu. On est ici dans une atmosphère très intime, assez commune chez les peintres hollandais

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Jésus et les pèlerins d’Emmaüs, 1648

On retrouve le même type d’intimité que dans le Philosophe. Mais les personnages occupent ici toute la moitié inférieure de la toile. Le Christ, au centre, est encadré par deux pèlerins. Un serviteur apporte une tête d’agneau rappelant le sacrifice.

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Le bœuf écorché, 1655

La pièce de bœuf, représentée avec tout sa chair sanglante et toute sa graisse, paraît immense. Derrière, une petite figure féminine entrouvre une porte.

 

Autoportrait à la toque et à la chaîne d’or & Rembrandt tête nue, 1633

Rembrandt a ici 27 ans. L’ovale du tableau souligne l’amabilité du visage. La chaîne d’or signale un statut social relativement aisé (sans être riche). La toque cache une calvitie naissante.

L’autoportrait permet à Rembrandt d’avoir un sujet on ne peut plus docile, sur lequel il peut tester tous les effets de lumière, faire des essais sur la figure humaine.

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Autoportrait de 1660

Rembrandt, qui a désormais 54 ans, se regarde et nous regarde pour répondre à la question commune : qui suis-je ? Son visage ridé (à comparer avec les portraits de jeunesse) est couronné d’un bonnet blanc jauni. Il est en train de peindre, palette à la main. Ce tableau est plus sombre que les autres autoportraits. " Je ne peins pas l’homme, je peins le passage ". Cette phrase de Montaigne paraît bien correspondre à ce qu’a voulu faire Rembrandt dans sa série d’autoportraits.