Table des matières

Les Médicis

Par Pierre Antonetti

Les origines

Propriétaires de terres au Nord de Florence, il n’est pas certain que les Médicis est un quelconque rapport avec la médecine ou même la pharmacie. Le premier Médicis connu semble appartenir à la corporation des changeurs. Les palle symboliseraient alors des pièces de monnaie.

Les Médicis prennent de l’importance à la fin du XIIIe siècle, lorsqu’ils accèdent à la charge de gonfalonier (la plus haute charge de la République). Ils occupent une place importante dans la classe dirigeante et noue des alliances matrimoniales avec des familles puissantes. Cependant, leur richesse est encore mesurée et ils se rattachent au parti populaire (popolani). La peste de 1348, en décimant certains de leurs concurrents, va accroître leur fortune.

Le premier Médicis qui joue un rôle politique important est Salvestro. En 1378, il encourage la révolte des Ciompi (ouvriers textiles), ce qui lui vaut d’être exilé mais aussi de positionner les Médicis aux côtés du petit peuple. Confronté à la réaction du parti opposé, la famille se tient quelque temps à l’écart de la politique et se consacre à ses affaires.

Giovanni di Bici (1360 – 1429) est le véritable fondateur de la banque Médicis. Ses affaires sont florissantes et il devient l’une des plus grande fortune de Florence. Plus sage que ses prédécesseurs, il obtient l’honorable charge de Podestat en 1407. A son fastueux enterrement sont représentés tous les grands de l’époque. Ils laissent deux fils, Lorenzo et Côme.

La première branche

Côme l’Ancien (1389 – 1464)

Côme bénéficie d’une solide éducation complétée par des voyages. Il épouse la fille des célèbres banquiers Bardi. Dans un premier temps, Côme se heurte à l’hostilité du pouvoir en place. Condamné à un exil de dix ans, il revient triomphalement de Venise un an plus tard (1434), à la suite d’un changement de gouvernement. Il règne ensuite pendant trente ans, de façon peu scrupuleuse. Il jugule l’opposition par des bannissements et des redressements fiscaux aussi drastiques qu’injustes (il ruine un honnête Strozzi), manipule les listes électorales et neutralise les conseils républicains par des commissions extraordinaires puis par la création en 1458 d’un conseil de cent membres qui lui est entièrement dévoué. A cela s’ajoute une police politique. Sa politique extérieure est efficace (changements subtils d’alliances). Il est l’un des instigateurs de la paix de Lodi (1454) qui unit les Etats italiens contre l’ennemi ottoman, octroyant quarante années de paix à la péninsule. Il est admiré de Louis XI. Côme est tout aussi habile en tant que banquier et entrepreneur, mais si la holding Médicis se heurte vers la fin de sa vie à une situation économique défavorable. Côme est également un mécène éclairé. Amis des humanistes, il constitue une riche bibliothèque et une impressionnante collection d’œuvres et d’objets d’art. Il restaure des églises et ait construire ou agrandir de nombreux palais (« Dans moins de cinquante ans, on nous expulsera, mais mes édifices resteront). Il encourage Donatello, Lippi, del Sarto, Ucello et l’architecte Michelozzo.
Manquant de prestance et d’éloquence (et conscient de ses défauts), misanthrope mais pieux, Côme s’éteint en 1464, laissant la place à son fils Pierre (Giovanni, probablement plus doué est mort en 1463).

Pierre le Goutteux (1416 - 1469)

Pierre n’a pas l’envergure intellectuelle et politique de son père. Il est cependant bon diplomate ce qui lui vaut l’amitié de Louis XI (qui lui octroie trois fleurs de lys pour le blason des Médicis) et du pape Paul II. Il échappe à un complot grâce au soutien de Sforza (Milan) et exile ses adversaires. Sous sa gouvernance, plusieurs sièges de la banque connaissent des difficultés financières. Il poursuit l’œuvre de mécène de Côme (il encourage les mêmes artistes, auxquels vient s’ajouter Botticelli). Il meurt de la goutte dont il a souffert toute son existence.

Laurent le Magnifique (1449 – 1492)

A 20 ans, Laurent succède à son père. Il est doté d’une solide instruction (humaniste, musicien, poète et écrivain) et est initié très tôt à la vie publique. Amateur de tous les plaisirs, notamment de femmes, il délaisse son épouse Claire Orsini (tout en lui faisant neuf enfants dont sept survivants).
A la tête de Florence, il montre toutes les qualités et tous les défauts (absence de scrupules, cynisme) de son grand-père. Il confond ses propres intérêts et ceux de l’Etat, poursuivant les pratiques de son grand-père (manipulation des listes électorales, noyautage des institutions et des magistratures, création d’un dévoué Conseil des 70 en 1480, arme fiscale…). Derrière les apparences conservées de la République, la dérive monarchique est nette. Il réprime le complot des Pazzi (1478) comme un crime de lèse-majesté. Un conflit s’élève entre les Médicis et les Pazzi suite à la faveur que le pape Sixte IV octroie à ces derniers. Laurent réplique par des lois qui leur sont défavorables. Les Pazzi décident, avec le soutien du pape, d’assassiner Laurent et son frère. Seul Julien est tué. Les florentins se mobilisent pour porter secours au Médicis. Les comploteurs sont exterminés, les blasons des Pazzi sont détruits. Le pape, qui souhaitait accroître son pouvoir au détriment des Médicis, excommunie Laurent et attaque Florence avec Naples. Laurent parvient à retourner l’alliance napolitaine à son profit. La paix est vite retrouvée.
Laurent cherche à rehausser le prestige de la famille par des alliances matrimoniales avantageuses. Il pousse aussi l’un de ses fils, Jean, dans la carrière ecclésiastique (futur pape Léon X). En revanche, il gère très mal les affaires de la banque familiale, puisant dans ses caisses pour ses dépenses personnelles. A sa mort, la banque est au bord de la faillite. Son œuvre de mécène est plus brillante. Il encourage Botticelli, Ghirlandaio, Filippino Lippi, Pollaiolo, Signorelli, le Perugin. Il reste cependant moins généreux que Côme. Enfin, écrivain, il oscille entre hédonisme et piété.

Julien de Médicis (1453 – 1478)

Frère de Laurent, amateur comme lui de plaisirs, il est assassiné par les hommes des Pazzi. Il laisse un bâtard, Jules, futur Clément VII.

Pierre le Malchanceux (1473 – 1503)

Premier des fils de Laurent, Pierre cumule les défauts de ses parents sans en avoir les qualités (aucun goût pour les arts). Lorsqu’il succède à son père à l’âge de 20 ans, il manque d’expérience. Sa conduite indispose bientôt tous ses alliés potentiels. Il commet une erreur politique majeure en s’opposant au roi Charles VIII, venu conquérir Naples (avec l’appui du milanais Ludovic Sforza). Le roi expulse les banquiers italiens de France, ce qui affecte la banque Médicis, dont le comptoir le plus prospère se situait à Lyon. De plus, les florentins et Savoranole (avec lequel il avait initialement de bonnes relations) étaient plutôt favorables au roi de France. Néanmoins, le retournement radical de Pierre, qui cède à Charles VIII le droit de passage dans l’Etat et quelques villes (temporairement), provoque la colère de la ville (notables et population confondue). Pierre et son frère Jean sont chassés et condamnés à mort. Charles VIII obtient la levée de la condamnation mais pas celle de l’exil. Plusieurs tentatives de reprise de la ville échouent. Ainsi s’éteint la première lignée des Médicis au pouvoir.

Léon X (1475 – 1521)

Jean, fils cadet de Laurent, est destiné par son père à une carrière ecclésiastique. Il reçoit une excellente éducation humaniste facilitée par sa curiosité et sa mémoire. Tonsuré dès l’âge de 8 ans (sans prononciation de vœux), son ascension est facilitée par l’entente qui règne entre son père et le pape Innocent VIII. Cardinal in petto dès 14 ans (en titre à 16 ans), Louis XI et le roi de Naples lui offrent plusieurs grandes abbayes (dont celle du Mont Cassin). Comme sont père, il a le goût du luxe et une complète absence de scrupules. Quand Laurent meurt, il est confronté à Savonarole, qu’il soutient dans un premier temps. Mais il est chassé de Florence avec son frère Pierre en 1494 (il met le trésor familial à l’abri avant de fuir). En 1499, il cesse de soutenir les tentatives de son frère pour reprendre le pouvoir, comprenant que celles-ci sont vaines. Il effectue quelques voyages (Bavière) avant de revenir à Rome pour mener une vie brillante sous la protection d’Alexandre VI puis de Jules II. En 1512, la Sainte-Ligue chasse Pierre Soderini de Florence, permettant le retour des Médicis. Jean, devenu l’aîné, dirige la ville pendant un an avant de céder les rênes au fils aîné de Pierre le Malchanceux, Laurent (qui reçoit aussi le commandement des armées pontificales ainsi que le duché d’Urbin en 1516). Il lui conseille de tout contrôler en maintenant cependant la fiction républicaine. Quelques complots désamorcés permettent aux Médicis d’écarter leurs adversaires (dont Machiavel, qui se retire sur ses terres).
La politique étrangère de Léon X consiste en un savant double-jeu d’alliances avec les espagnols et avec la France. Son frère Julien épouse Philiberte de Savoie, tante maternelle de François Ier. Mais il meurt un an plus tard. Léon X marie alors Laurent à Madeleine de la Tour d’Auvergne , sans pour autant se fâcher avec Charles Quint.
En tant que défenseur de la chrétienté, il lance une croisade contre le sultan Sélim mais ne réplique que tardivement à Luther, qu’il excommunie en 1520, trois ans après ses premières proclamations. Il ne procède à aucune réforme de l’Eglise, lui-même étant d’ailleurs très mondain.
Il enrichit la bibliothèque vaticane et protège de grands artistes, notamment Raphaël (et de moindre façon Michel-Ange)

Clément VII (1478 – 1534)

Jules de Médicis, fils illégitime de Julien, frère de Laurent le Magnifique, a bénéficié de la même éducation que les enfants de Laurent. Son destin est parallèle à celui de Léon X (ils fuient ensemble de Florence en 1494, ils voyagent ensemble…). Devenu pape, celui-ci le fait archevêque de Florence en 1513, puis il le légitime pour le nommer cardinal (avec de multiples dignités et bénéfices). Après la mort de Laurent (neveu de Léon X), en 1519, il dirige Florence, maintenant comme ses prédécesseurs la fiction républicaine pour asseoir son contrôle.
Adrien d’Utrecht (Adrien VI) succède à Léon X grâce au soutien du roi de France. Sa mort rapide (1523) permet cependant à Jules d’être élu pape à son tour, avec le soutien impérial. Il poursuit la politique de Léon X, balançant sans cesse entre Charles Quint et François Ier. Lorsqu’il adhère à la ligue de Cognac en 1526, Charles Quint réplique en lançant ses armées sur Rome. Les lansquenets fanatiques du comte de Frunsberg (et du connétable de Bourbon) se livre à un abominable sac (1527) auquel le pape assiste, dans son château de Sant’Angelo, impuissant et terrifié. Pour obtenir le retrait des troupes, il accepte de payer une lourde contribution.
A l’annonce du sac de Rome, Florence se soulève contre les Médicis (Alexandre et Hippolyte), profitant de l’affaiblissement du pouvoir papal. Clément VII s’appuie sur le pouvoir impérial, auquel il vient de céder (il couronne Charles Quint empereur), pour reprendre la ville en 1530. Il transforme alors l’Etat en duché, mettant fin à la fiction républicaine. Alexandre, son fils illégitime, devient ainsi le premier duc de la cité, dans une complète sujétion à l’Espagne.
Pour autant, Clément VII ne néglige pas complètement le camp français, en mariant Catherine au futur Henri II. Il se signale également en refusant à Henri VIII le divorce avec Catherine d’Aragon, provoquant la naissance de l’Eglise anglicane. Il n’entreprend aucune réforme de l’Eglise pour faire face au protestantisme. On peut globalement estimer qu’il manque de force politique. En revanche, il a un mécénat important et intelligent (Michel-Ange).

Alexandre (1512-1537)

Fils naturel de Clément VII, il reçoit à 10 ans la charge de gouverneur de Florence, qu’il partage avec Hyppolite . Les deux jeunes garçons sont secondés par le cardinal Passerini. En 1527, Florence se soulève et chasse les Médicis qui sont ramenés au pouvoir par Charles Quint (1530). Alexandre est fait duc, ce qui lui vaut la jalousie d’Hyppolite (cardinal) qui complote contre lui avant de mourir en 1535, peut-être empoisonné.
Peu attiré par les choses de l’esprit, Alexandre confie le gouvernement à un conseil restreint et mène une vie dissolue. Il épouse une fille naturelle de Charles Quint. En janvier 1537, il est assassiné par un cousin éloigné, Laurent .

Catherine de Médicis (1519 – 1589)

Dernier rejeton de la première branche des Médicis, Catherine marque l’apogée d’une progression des ambitions matrimoniales de la famille . Elle est la fille de Laurent II, duc d’Urbin, fils de Pierre et petit-fils du Magnifique et de Madeleine de la Tour d’Auvergne, descendante de Saint Louis par sa mère et de Godefroy de Bouillon par son père. Catherine perd ses parents à l’âge d’un mois. Elle est élevée à Rome par sa grand-mère paternelle, Alphonsine Orsini puis par sa grand-tante Lucrèce Salviati et sa tante Clarice Orsini. Elle grandit avec Alexandre et Hyppolite, pour lequel elle a une grande affection. Clément VII la renvoie à Florence lorsqu’il est élu. Après le sac de Rome, les florentins l’enferment dans un couvent où elle mène une douce vie. Mais à l’arrivée des troupes impériales en 1530, les républicains cherchent à se venger des Médicis sur la personne de Catherine (on menace de l’exposer nue sur les remparts, de la prostituer…). Cependant les sœurs la protègent et elle ne fait que changer de couvent. Elle n’oubliera cependant jamais la terreur subie et en conçoit une détestation profonde pour tout conflit armé. Entre 1530 e t1532, elle vit de nouveau à Rome. En 1531, son mariage avec Henri d’Anjou est conclu, symbole de la bonne entente entre François Ier et le pape. Le mariage est célébré à Rome (par procuration) en 1533 puis à Marseille.
Catherine séduit François Ier et sa sœur Marguerite, mais pas son époux qui lui préfère Diane de Poitiers. En 1536, Henri devient dauphin (mort de son frère). En an plus tard, Diane est officiellement sa maîtresse. La stérilité prolongée de Catherine la met en danger de répudiation. Mais des conseils médicaux apportent la solution au problème du couple. Un fils naît en 1544. En tout, Catherine aura dix grossesses et sept enfants. Ombre au tableau, ses enfants lui sont enlevés pour être éduqués par Diane.
En 1547, Henri devient roi. Catherine n’est pas particulièrement populaire. On lui reproche son origine roturière et étrangère. De plus son entourage italien est particulièrement présent, notamment ses cousins Strozzi, qui rêvent de reprendre Florence à Côme Ier, que Catherine elle-même considère étrangement comme un usurpateur.
En 1559, la signature du traité de Cateau-Cambresis marque la fin des ambitions italiennes de la France. Henri II décède la même année. Catherine portera ostensiblement son deuil jusqu’à la fin de ses jours. Diane de Poitiers disparaît de la scène politique. Les Guise, en revanche, monte en puissance. François II, le nouveau roi, a en effet épousé leur nièce Marie Stuart.
Cependant le règne de François II ne dure pas. Dès 1560, son frère Charles IX lui succède, Catherine assurant la régence du royaume. Elle doit faire face aux guerres de religion. Catholique modérée, sans haine pour les protestants, elle tente tous les compromis pour éviter la guerre civile (premier édit de Saint Germain en 1562) et protège le prince de Condé, au grand dam des Guise. Pour affermir le pouvoir et faire connaître le roi, elle entreprend avec Charles IX en grand tour de France entre 1563 et 1564. Le compromis est encore recherché en 1570 par un second édit de Saint Germain.
Mais en 1572, les complots qu’elle soupçonne chez les huguenots, sa peur d’un renversement de la monarchie et d’une atteinte à la vie de ses fils (mama italienne), lui inspire l’idée de supprimer les chefs protestants. Le massacre organisé tourne à la boucherie incontrôlée : c’est la Saint Barthélemy, qui dure toute une saison.
Elle obtient pour son fils favori, Henri, la couronne de Pologne. Mais il ne la conserve pas longtemps, la mort de son frère le rappelant en France en 1574. Le nouveau roi, Henri III, n’est guère populaire. Catherine l’est encore moins (xénophobie, accusation de sorcellerie, d’empoisonnement). Elle suscite la défiance des ligueurs et son propre fils François d’Alençon (puis d’Anjou) cherche à lui nuire. Quoi qu’il en soit sa ligne de conduite est intangible : défense du roi et de l’unité du royaume, refus de la guerre civile.
En 1584, son fils François meurt tandis qu’Henri reste sans héritier. Par le traité de Nemours, en 1585, Henri IV, héritier légitime mais protestant, est contraint de renoncer au trône. C’est le début d’une guerre. Les Guise guettent eux aussi le trône. Le 23 décembre 1588, sans avertir sa mère, Henri III fait assassiner le duc (et son frère le lendemain). La rupture entre le fils et la mère, qui condamne cet acte, est consommée. Catherine s’éteint le 5 janvier 1589.

La deuxième branche

Jean des Bandes noires (1498 – 1526)

Jean (initialement prénommé Ludovic) appartient à la seconde branche des Médicis. Il est le fils de Jean de Médicis (1467 – 1498) et de Catherine Sforza (1462 – 1509), descendante des maîtres de Milan et épouse en premières noces du pape Sixte IV. A la mort de son père, sa mère le place chez les Salviati (Lucrèce Salviati est une fille de Laurent le Magnifique). Elle-même l’élève de façon virile. L’intérêt de Jean ne se porte d’ailleurs que sur les arts martiaux. Il épouse Maria Salviati, dont il a un fils, Côme.
Léon X lui confie son armée. Il s’illustre par son courage, sa dureté et ses qualités de stratège. En 1421, à la mort du pape, il raye son drapeau blanc de bandes noires, ce qui lui vaut son surnom. Délié de son engagement envers le Saint-Siège, il se met au service de divers princes, en fonction de la rémunération offerte. Ainsi passe-t-il du service de François Ier à celui du milanais Sforza avant de revenir au service du roi de France. Il n’est pas présent à Pavie, pour cause de blessure, mais François Ier affirma qu’avec lui, le sort de la bataille eût été différent. Pendant la courte paix entre François Ier et Charles Quint, il se fait corsaire, avant de reprendre du service côté français, harcelant les troupes que l’empereur fait marcher sur Rome. Blessé par un boulet, il meurt de la gangrène.

Côme Ier (1519 – 1574)

A la mort d’Alexandre, la première branche des Médicis perd l’exercice du pouvoir à Florence, qui tombe entre les mains de la seconde branche. Côme est le fils de Jean des bandes noires et d’une petite fille de Laurent le Magnifique, Maria Salviati. Il ne reçoit l’éducation humaniste des premiers Médicis, passionné surtout par la chasse et les arts martiaux. Il s’impose pour succéder à Alexandre comme duc et obtient la reconnaissance de l’empereur. Il commence par exiler ses ennemis. En 1539, il épouse la fille du vice-roi de Naples, Eléonore. Il obtient du pape le titre de grand-duc, que l’empereur n’accordera qu’à son fils. Il exerce sur son Etat une surveillance omniprésente et contrôle jusqu’au bénéfices ecclésiastique. Il crée une administration d’hommes neufs, les privilèges de rang s’effaçant devant la compétence. Pour se libérer de l’emprise espagnole, il fortifie son Etat et crée une flotte de guerre (avec laquelle il participe à la bataille de Lépante en 1571). Sa politique d’expansion territoriale est infructueuse. Il n’obtient que Sienne (contre l’effacement des dettes de la couronne d’Espagne). En revanche il favorise le développement économique de la région. Sous son impulsion, Pise devient la deuxième ville de l’Etat, avec une université qui surpasse presque celle de Florence.
Il entreprend de nombreux travaux d’urbanisme : aménagement de son palais par Vasari, aménagement du palais Pitti, création de la galerie des Offices (pour l’administration), construction de pont, rénovation d’églises… Il protège Cellini et crée deux académies propre à servir sa politique culturelle et à exalter son image : l’académie florentine (1543) et l’académie des arts plastiques (1563). Il enrichit le trésor des Médicis.
Avant de mourir, il perd de nombreux enfants et sa femme (il en épouse une seconde qui veille sur ses derniers jours). Malade, il laisse progressivement l’essentiel du pouvoir à son fils François avant de s’éteindre en 1574.

François Ier (1541 – 1587)

Fils de Côme Ier, il n’a pas la carrure de son père. Marié par celui-ci à Jeanne d’Autriche, fille de l’empereur Ferdinand Ier, il n’aime guère cette femme laide et hautaine. Il en aura cependant six enfants, dont Marie de Médicis. Amoureux d’une femme à la vie aventureuse, Bianca Capello, il fait assassiner son mari en 1572. La mort de Jeanne, en 1578, lui permet d’épouser sa maîtresse, malgré les préventions de son frère, le cardinal Ferdinand. Bianca, en tentant d’empoisonner ce dernier, aurait involontairement empoisonné son mari, avant de se suicider. Ferdinand refuse de l’enterrer dans le caveau familial.
François Ier, passionné de chimie et de sciences naturelles, laisse le pouvoir à ses ministres, ne procédant qu’à quelques aménagements urbains et à la création de l’académie de la Crusca (qui établira un dictionnaire de la langue italienne, en faisant du florentin un modèle). Il enrichit à son tour le trésor des Médicis et donne, pour satisfaire sa première épouse, des fêtes somptueuses. Il obtient de l’empereur le titre de grand-duc qui avait été refusé à son père.

Ferdinand Ier (1549 – 1609)

Fils de Côme Ier, il devient cardinal à 14 ans (sans prononcer de vœux). Humaniste passionné d’antiquités romaines, il vit à Rome jusqu’à ce que la mort sans héritier de son frère le rappelle à Florence. Prenant à son tour le titre de grand-duc, il épouse Christine de Lorraine (petite-fille de Catherine de Médicis). De ce mariage heureux naissent neuf enfants. Son mariage français l’incite à soutenir Henri de Navarre qu’il aide financièrement (annulation de dettes), religieusement (conversion), militairement (il repousse avec ses galères les espagnols) et en lui donnant sa nièce Marie en seconde noces (avec avoir obtenu l’annulation du mariage avec Margot).
Cependant, la persistance des guerres de religion en France le pousse à se tourner vers l’Autriche, en mariant son fils Côme à Marie-Madeleine d’Autriche. Il s’assure par d’autres mariages de la neutralité de ses voisins.
Sous son règne, croissance économique et finances publiques se portent bien. Il crée un atelier de pierres dures au sein de la Galerie des Offices. Il reprend le projet de Côme Ier de dresse une chapelle des princes dédiée à San Lorenzo, qui devient le somptueux monument funéraire des Médicis.

Marie de Médicis (1573 – 1642)

Marie est la quatrième fille de François Ier de Médicis et de Jeanne d’Autriche. Elle perd sa mère à cinq ans et est écartée par sa belle-mère Bianca Capello. A la mort de son père, elle passe sous la tutelle de son oncle Ferdinand. Celui-ci décide de la marier à Henri IV, après avoir obtenu l’annulation du mariage avec Margot et une promesse de conversion au catholicisme. L’accord est signé en 1600. Un fils naît dès 1601.
Marie souffre de l’inconfort du Louvre et de la présence de la favorite du roi Henriette d’Entragues et de bâtards du roi. Le roi l’accueille sans animosité mais les défauts de son épouse – manque d’intelligence, orgueil, goût du faste, absence de sentiment maternel, réputation d’empoisonneuse - apparaissent rapidement. C’est surtout son entourage qui pose problème : elle est sous la coupe de Leonora Galigai et de son mari Concino Concini, deux êtres cupides.
Elle ne se préoccupe de ses enfants que lorsqu’ils sont en âge de se marier. Elle tente de les unir à tous les grands d’Europe, avec une préférence pour l’Espagne (Anne d’Autriche est la fille de Philippe II).
On la soupçonne d’avoir été la complice (passive) de l’assassinat de son époux en 1610. Régente pendant quatre ans, elle préserve la paix intérieure et extérieure. Mais elle ruine le trésor par ses dépenses et celle des Concini, provoquant la démission de Sully.
En 1617, Louis XIII marque son indépendance en faisant assassiner Concino et en faisant brûler Leonora comme sorcière. Marie est exclue du Conseil. Pour se venger, elle participe à la révolte organisée contre le roi par le duc d’Epernon en 1619, après s’être échappée de Blois où elle était en résidence surveillée. Elle se rebelle de nouveau en 1620, avant une réconciliation qui lui permet d’accéder au Conseil en 1622. Elle amène Richelieu à la cour. En 1624, elle entame la construction du Palais du Luxembourg. C’est là qu’à lieu la journée des dupes (1630). Marie tente en vain de provoquer une rupture entre Richelieu et son fils. Celui-ci l’exile à Compiègne. Son second fils, Gaston d’Orléans, tente un soulèvement pour venir à son secours. Il échoue et se réfugie en Espagne (une guerre éclate entre 1635 et 1636). Marie part vivre à Bruxelles, puis en Angleterre et enfin en Allemagne. Elle meurt à Cologne en 1642, avant son fils dont elle guettait le décès pour revenir en France. Elle ne joue pour la France aucun rôle bénéfique.

Côme II (1590 – 1621)

Fils de Ferdinand Ier, son mariage avec Marie-Madeleine d’Autriche est peu heureux. Sa mère Christine de Lorraine et sa femme s’oppose sur la politique étrangère du grand-duché. Il tente de maintenir un équilibre entre les grandes puissances. La maladie écarte Côme de la politique, ses ministres assurant la continuité de l’Etat. Il fait fermer les succursales de la banque Médicis, jugeant cette activité indigne de sa maison. Sa flotte remporte quelques succès contre les corsaires turcs. Il se distingue par la protection qu’il octroie à Galilée et par les fêtes somptueuses qu’il donne pour satisfaire sa mère et sa femme. C’est également sous son règne qu’est publié le vocabolario de l’académie de la Crusca (1612).

Ferdinand II (1610 – 1670)

Fils de Côme II, il grandit sous la double régence de sa mère Marie-Madeleine d’Autriche et de sa grand-mère Christine de Lorraine. Pendant l’interrègne, la faveur est donnée aux fêtes somptueuses et à la vie religieuse. Ferdinand II prend le contre-pied des deux femmes en réduisant l’influence de l’Eglise. Il accorde sa protection à Galilée et à Torricelli et fonde l’académie expérimentale.
Bon vivant (bisexuel), débonnaire, il montre peu d’ambition. Il ne fait que s’opposer au pape Urbain VIII lorsque celui-ci veut créer pour ses neveux un Etat, aux dépens de ses voisins. De son épouse Vittoria della Rovere lui naît un fils, Côme, qu’il marie à Marguerite Louise, fille de Gaston d’Orléans.

Côme III (1642 – 1723)

Fils de Ferdinand II, il est essentiellement élevé par sa mère et reçoit une éducation religieuse stricte. Son père le marie à une nièce de Louis XIII, Marguerite-Louise, imbue d’elle-même et amoureuse d’un autre. La mésentente est totale. De 1667 à 1669, il voyage pour échapper à la vie conjugale. Devenu prince régnant en 1670, il revient à Florence. Sous l’influence de mère, il demeure bigot, pratiquant une politique intolérante (persécution des juifs, des homosexuels ; peine de mort accompagnée d’écartèlement ; suppression de la protection des savants). Ses politiques étrangère et économique ne sont guère plus reluisantes. En 1675, Louis XIV cède aux supplications de Marguerite-Louise et l’autorise à revenir en France (elle s’enferme provisoirement dans un couvent de Montmartre). Son fils aîné, Ferdinand, jouisseur et mécène, meurt en 1710. Le mariage de son second fils, homosexuel, est stérile.
En 1718, les grandes puissances décident de donner le grand-duché de Toscane à don Carlos d’Espagne (les Médicis conversant la direction de l’Etat de Florence au sein du grand-duché).

Gian Gastone (1671 – 1737)

Fils de Côme III, Gian Gastone est le dernier des Médicis régnant. Dépressif, homosexuel, il est marié malgré lui à la fille du duc de Saxe Lauenburg en 1697. Il fuit sa femme pour se réfugier à Paris, chez sa mère, qui l’accueille sans enthousiasme. Il part ensuite à Prague. Après ces voyages, durant lesquels il mène une vie dissipée, il retourne à Florence en 1708, sans sa femme. A la mort de son père (1723), il exerce à son tour le pouvoir. Il commence par abolir la peine de mort et les persécutions religieuses et par alléger les impôts. Cependant, ces heureuses prémices n’ont pas de suite. Laissant le pouvoir à Carlo Rinuccini, un homme intègre qui avait servi son père, il s’entoure de canailles et se complaît dans la débauche (pratiques masochistes ?). En 1731, les grandes puissances confirent leurs dispositions de 1718. Puis en 1735, le grand-duché change de mains, Gian Gastone restant à la tête de Florence jusqu’à son décès.

Anne-Marie Louise (1667 – 1743)

Dernière des Médicis, sœur de Gian Gastone, Anne-Marie est belle, cultivée, orgueilleuse. Marié à l’électeur palatin de Saxe, elle ne lui donne pas d’héritier et rentre à Florence à la mort de son mari. Elle mène une vie dévote, assistant avec mépris à la déchéance de son frère. Elle achève la construction de la chapelle San Lorenzo et lègue le trésor familial à la ville de Florence.